Yanaka est un vieux et beau quartier
qui a miraculeusement échappé aux destructions successives de Tokyo. Il n’échappera peut-être pas à celle qui menace
le Japon qui est la crise démographique car il semble essentiellement peuplé de
vieilles personnes, ce qui lui donne ce rythme doux et silencieux. On y vient
pour visiter les temples, et admirer les bouddhas.
On y vient aussi pour
honorer les ancêtres et faire brûler de l’encens devant les tombes d’un des
plus beaux cimetières de Tokyo. J’ai encore une fois été frappé par le petit
parc pour enfant au cœur du cimetière. Quels étranges enfants peuvent bien
venir y faire de la balançoire au clair de lune ? Si l’on vient à Yanaka
au mois d’aout, pendant les fêtes d’O-bon c’est aussi pour visiter le temple
Zenshoan où sont rassemblées les plus célèbres peintures de fantômes de l’ère
Edo. Belle revenantes estompées par les voiles, spectres carnassiers, ombres
vagues comme si le peintre avait voulu saisir ce qui échappe presque à la
vision…
Mais c’est tout le quartier qui est baigné d’une douce étrangeté. Un
peu plus bas dans la rue, il y a le café Ranpo, du nom du célèbre écrivain
eroguro – et quand on y pense c’est peut-être à Yanaka qu’on situerait la
demeure de Shizuko, la femme fatale de La
proie et l’ombre.
Le café Ranpo était fermé ce jour-là, et je notais sa
devanture rénovée, sans la multitude de dessins et sculptures de chats. Je me demande si monsieur Suzuki, le très
vieux monsieur que j’avais rencontré il y a 6 ans en était encore le
propriétaire.
Le Café Ranpo en 2010 |
La dessinatrice Chiiko Ayasaki y était serveuse. En explorant
son site (ici)
, je m’apercevais que ses dessins érotiques prenaient comme décor le café
Ranpo.
En revanche, dans la première rue à
gauche, la petite boutique pour otome
qui vend des cartes postales et des petites sculptures de yokais était bien
ouverte.
J’achetais cet objet : un masque reproduisant le sourire au
rasoir de Kuchisake Onna, la femme
défigurée, célèbre fantôme de légendes urbaines des années 80. Elle-aussi on l’imagine
bien hanter les rues de Yanaka dans son imperméable gris.
En bas de la rue un restaurant à
Sushis peuplé bien entendu de vieilles personnes et de jeunes filles démodées.
A côté, un autre fantôme.
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