Les Necronomidol sont les
chamanes de la J-pop : cinq jeunes filles de moins de 20 ans qui depuis
2014 mixent les chants emo des idoles, avec du métal et de
l’électro. Les vraies racines de Necronomidol sont cependant plus anciennes et
puisent dans les musiques de JA Seazer pour Shuji Terayama. Ce fameux angura. On adore bien sûr la
farouche guerrière Risaki Kakizaki et ses pointes de cheveux rouges comme du
sang séché, mais l’idole immédiate est Sari avec ses cheveux verts et son
araignée sur la joue. Necronomidol est à la base un projet hybride
puisqu’initié par Ricky Wilson, un producteur américain suite au succès de
groupes alternatifs comme Baby Metal. D’où peut-être sa nature davantage
underground que mercantile et son respect de l’intégrité de ses
musiciennes. Les Necronomidol sont autant des chanteuse que des actrices autour
desquels s’élabore un concept empruntant à Suehiro Maruo, à Lovecraft et aux
croyances shinto.
Dans Psychopomp, l’un de leurs plus
beaux clips, elles sont mises en scène par le photographe Dan Szpara à
Aokigahara, la fameuse forêt des suicidés. On croit d’abord à des images fixes,
déjà fascinantes, avec ces lichens verdâtres et mordorés couvrant les troncs
d’arbres, mais si on y prête attention, il y a toujours un frémissement dans
l’image : une touche de lumière vibrante, des feuilles d’herbes, des
insectes… Les Necronomidol apparaissent une à une, elles-aussi immobiles, comme
intégrées à cette vie séculaires. Elles ne chantent pas et ne sont jamais
réunies. Chacune est découpée en plans de mains, de jambes, de cheveux, comme
si elles entraient dans un monde dont le visage n’était plus le centre et dont
le temps humain n’était pas non plus la mesure. Si la forêt les entoure, elles
sont comprises entre deux motifs : un crâne de cerf blanchi et ce tapis de
feuilles d’automne gorgé d’humidité. Les jeunes filles magiques mènent ainsi
cette vie parallèle, entre l’os ayant atteint son point inaltérable et les
matières organiques en décomposition.