Angel Guts: Red Classroom (1979) de Chusei Sone, scénario Takashi Ishii
Muraki, éditeur de magazines érotiques, assiste à la projection privée d’un film déjà ancien : une lycéenne se faisant violer par 5 hommes dans une salle de classe. Muraki est bouleversé par le visage de la jeune fille, qui tombe en syncope au terme de son viol et se relève, dénué de toute expression, et retombe encore. Le viol était-il réel ? A-t-il assisté à la destruction d’un être humain.
Muraki retrouve la jeune fille, nommée Nami, au guichet d’un Love Hotel, cadre d’une séance photo. Il lui donne rendez-vous; ils vont à l’hôtel mais il refuse de lui faire l’amour. «Je veux te revoir demain» lui dira-t-il. Mais elle ne viendra pas ; elle lève un homme dans un bar et nous aurons l’exemple de sa folie : une sexualité violente et insatiable.
Muraki ne cesse pourtant pas de l’aimer. 3 ans plus tard, alors qu’il erre ivre dans les ruelles de Golden Gai, il la voit dans l’embrasure de la porte d’un bar. Il tente de l’entraîner avec lui mais le patron, amant de Nami, le roue de coups dans un terrain vague. Il revient pourtant le lendemain et se fait à nouveau battre, mais cette fois il reste dans le bar.
Il observe alors les activités de Nami qui se donne sur le comptoir à 5 hommes, reproduisant le film initial... et il voit aussi que l’on sort une lycéenne ligotée, d’une trappe, et qui est violée à son tour.
Ce qui a détruit nami, au-delà encore de son viol, c’est le film lui-même, qui a volé son image, transformant son supplice en spectacle, le réitérant à chaque projection. On a atteint ici la plus infernale des dégradations. Nami non seulement reproduit les conditions de son viol mais remet en scène le spectacle de la destruction de son innocence sur une autre jeune fille.
Devant le bar, Nami semble sortir d’une vision néo-sirkienne de Fassbinder, un glamour corrompu. Elle entraîne Muraki dans son monde, absolument disloqué. C’est le passage le plus beau du film, expérimental et inattendu. Des plans de vitesse et d’énergie traversent la scène qui déstructure en faux raccord. Mais cette énergie ne va nulle part, ce n’est qu’une convulsion.