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mardi 12 septembre 2017
Aux écoliers japonais
Novövision, Yves Adrien, 1980
All About Lily Chou-Chou, Shunji Iwai, 2001
Ernest Shackleton, L'expédition Endurance, 1915
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Littérature
mardi 20 juin 2017
Richard Brautigan, encore une histoire de fantôme à Tokyo
Natif de Tacoma dans l'état de Washington, Richard Brautigan habitait le Montana
mais son autre pays était le Japon.
Un Japon d’abord ennemi comme il le
raconte dans l’avant-propos de Journal japonais, avec cet oncle qui mourut des suites d’une blessure causées par un bombardement sur les côtes du
Pacifique et dont le fantôme hanta le jeune Brautigan. Le Japon, il y viendra
plus tard, par les haïkus de Bashô, par la peinture et le cinéma, avant de rencontrer
le Japon réel au milieu des années 70. Ce n’est pas étonnant non plus qu’entre
le Montana et le Japon, ce soit un mort qui guide Brautigan, et que les
histoires de fantômes, ces kaidan japonais, circulent entre les deux pays.
Pas seulement bien sûr : il y a les histoires de gueules de bois, dont je ne sais pas si elles constituent un
genre littéraire, mais qui sont aussi un pont entre le Montana et le Japon !
Tokyo-Montana-Express (1980) est le plus beau livre jamais écrit.
On ne peut pas oublier le boucher aux
mains froides, le loup-garou dissimulé dans un buisson de framboises, la plus
petite tempête de neige du monde, la gueule de bois sculptée comme un objet de
l’artisanat populaire, les 390 photos d’arbres de noël, le dernier menu des
condamnés à mort, et on ne peut pas non plus oublier ce bar dont toutes les
serveuses sont identiques, le temple de la carpe à Shibuya, le kaidan de la brosse à dents, les
spaghettis préparés pour les amis japonais,
et l’irrévocable tristesse de son merci beaucoup. On ne peut pas oublier
le gamin japonais noyé et ses tennis « trempée et très froides, et
aussi lourdes d’une blancheur étrange, silencieuse absolument. »
L’autre grand livre de Brautigan est Journal
japonais, et ses 77 poèmes écrits entre le 13 mai 1976 et le 30 juin.
Par exemple : « les
chauffeurs de taxi ne ressemblent pas à leur photographie (…) De parfaits
inconnus conduisent ces taxis. »
Et pas mal de moments d’inexistence
qu’on a tous connus au Japon, sans forcément trouver cela désagréable.
Comme dans Tokyo-Montana-express, il y a aussi un texte sur un film érotique.
Lorsqu’il visite le Japon dans les années 70, c’est la grande vogue des roman porno et pinku eiga, films que Brautigan ne peut pas voir en Amérique. Dans Tokyo-Montana-express, Le Château de la
fiancée des neiges, le film le plus sensuel jamais tourné, provoquant des érections
fabuleuses, s’évaporait comme un fantôme, et ce qui disparaissait n’était pas
seulement le film mais le cinéma lui-même, remplacé par un petit jardin public.
Je n’ai jamais identifié même une partie du film dont parle Brautigan.
En revanche, le Fauteuil rouge dans Journal japonais est bien connu puisqu’il
s’agit de La Maison des perversités (1976)
de Noboru Tanaka d’après Edogawa Rampo.
On notera la fin délicieuse du poème
prouvant que Brautigan avait tout compris de l’eroguro.
Chez Tanaka, la femme qui est l’objet
de la passion de l’homme dissimulé dans le fauteuil est Junko Miyashita, la
femme aux cheveux rouges, l’autre Abe Sada, qui mériterait à elle seule un
recueil de poèmes amoureux.
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Junko Miyashita,
Littérature,
Pinku,
Richard Brautigan
dimanche 26 mars 2017
Romain Slocombe, Un été japonais, 2000
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Littérature,
Photographie,
Romain Slocombe,
Un mois de photographie et d'illustration,
Une image par jour
vendredi 25 novembre 2016
Yukio Mishima. 25 novembre 1970
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Littérature,
Mishima
dimanche 20 mars 2016
Lafcadio Hearn et la littérature insecte
Il y a bientôt 10 ans lors de mon
premier voyage à Tokyo, j’entendais dans la nuit d’août une sorte de
grésillement ininterrompu, un peu métallique, que j’attribuais naïvement aux
lignes électriques apparentes. Tout me semblait tellement irréel qu’au fond
Tokyo pouvait avoir un son n’appartenant qu’à lui. Lorsque j’ai appris qu’il s’agissait
du chant des cigales, j’ai trouvé la réalité encore plus étrange. Des cigales
en plein cœur de Tokyo…
Le recueil de textes de Lafcadio Hearn consacrés aux
insectes m’apprend qu’on dénombre au Japon sept variétés de cigales ou « sémi ». En été, j’entendais probablement
la « Mimmin-zémi » qui « se met à chanter au moment des
grandes chaleurs » ou bien la « Tsuku-Tsuku-Bôshi »
qui apparaît au « lendemain de la fête des morts » donc au mois d’août.
Ces listes d’insectes avec leurs noms et leurs particularités font toute la
poésie du livre et nous renvoient à ce Japon magique, toujours présent même au cœur
des mégalopoles. On connait bien sûr Hearn pour ses kaidan ou histoires de l’au-delà, qui sont la base des récits de
fantômes japonais. Hearn était un « folkloriste » mais il rajoutait
une dramaturgie et des descriptions terrifiantes héritées de son Irlande natale,
berceau de la littérature fantastique du XIXe siècle (Bram Stoker, Oscar Wilde,
Sheridan Le Fanu).
Aout 2016. Une cigale à Shinjuku. |
On comprend bien vite qu’Insectes
est un nouveau recueil d’histoires de fantômes. Comme les spectres, les
insectes cohabitent avec les hommes tout en demeurant la plupart du temps
invisibles. J’en avais fait l’expérience avec mes cigales dont je n’entendais
qu’une manifestation. Près du sanctuaire
Meiji du parc de Yoyogi, je trouvais quelques cadavres sur le sol. Ce n’étaient
que des enveloppes fragiles, vides et desséchées par la chaleur, comme si quelque
chose qui était la cigale avait
quitté sa forme terrestre.
L’autre correspondance entre les insectes et les fantômes est leur faculté à héberger les âmes des défunts. Ainsi ce grand papillon blanc, fantôme d’une adolescente, qui vient cueillir l’âme de son fiancé au moment de sa mort, cinquante ans plus tard. Cet homme qui revient sous l’apparence d’une mouche pour demander un service bouddhiste et accéder à une réincarnation plus correcte. Et bien sûr il y a les lucioles, dont une variété se nomme « yurei-otaru » ou luciole fantôme. L’intérêt du texte est davantage ici économique que fantastique, Hearn nous relatant un véritable commerce des lucioles, enfermés dans des lanternes et servant à décorer les restaurants ou les banquets. La libellule est bien sûr toute désignée pour être dotée de facultés fantastiques : la « shôrai-tombô » ou « libellule des morts » servirait ainsi de montures ailée aux esprits.
L’autre correspondance entre les insectes et les fantômes est leur faculté à héberger les âmes des défunts. Ainsi ce grand papillon blanc, fantôme d’une adolescente, qui vient cueillir l’âme de son fiancé au moment de sa mort, cinquante ans plus tard. Cet homme qui revient sous l’apparence d’une mouche pour demander un service bouddhiste et accéder à une réincarnation plus correcte. Et bien sûr il y a les lucioles, dont une variété se nomme « yurei-otaru » ou luciole fantôme. L’intérêt du texte est davantage ici économique que fantastique, Hearn nous relatant un véritable commerce des lucioles, enfermés dans des lanternes et servant à décorer les restaurants ou les banquets. La libellule est bien sûr toute désignée pour être dotée de facultés fantastiques : la « shôrai-tombô » ou « libellule des morts » servirait ainsi de montures ailée aux esprits.
Comme il y a
une littérature des fantômes, il y a une littérature des insectes, souvent sous
la forme de poèmes, des hokku
(première forme des haïkus) ou tanka.
Ces quelques vers recèlent souvent une énigme dont Lafcadio Hearn nous donne la
clé. Ainsi, pour exprimer l’amour caché d’une femme : « Quand tombe
le soir, mon âme brûle plus ardemment que la luciole ; mais ce feu ne peut
se voir et l’aimé reste insensible ».
Le moment le plus poétique du livre
revient à Hearn lui-même dans le chapitre consacré aux moustiques. Il relate
une polémique de son temps sur la forte affluence de moustiques dans les
cimetières à cause des bols d’eaux laissés en offrande aux défunts. Mais peu à
peu, comme si la mélancolie du mois d’août le gagnait, les moustiques sont
oubliés, et Hearn pense à sa propre sépulture et au repos de son âme.
« D’ailleurs lorsque sonnera l’heure
de mon départ définitif, j’aimerai être déposé dans l’un de ces vieux
cimetières bouddhistes. Ainsi les fantômes qui me tiendront compagnie seront
anciens et ne se préoccuperont ni des modes, ni des changements, ni des
désintégrations de l’ère Meiji. Le vieux
cimetière au fond de mon jardin conviendra très bien. Tout y est beau, d’une
beauté presque effrayante ; chaque arbre, chaque pierre y a été formé par
un idéal si antique que nul cerveau moderne ne saurait le concevoir… et les
ombres qui s’y cachent n’appartiennent ni à ce temps-ci, ni à ce soleil. »
Insectes de
Lafcadio Hearn (Les Éditions du Sonneur), Traduction de l’anglais et préface
d’Anne-Sylvie Homassel.
Le site des éditions du Sonneur ici
(illustration d'ouverture Keisai Eisen, période Edo)
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Lafcadio Hearn,
Littérature
dimanche 24 janvier 2016
L’adolescente japonaise ou l’impératrice des signes
Le 10 juillet 2015, je présentais un cours de cinéma au Forum des images sur le thème de l’adolescente japonaise. Sujet qui ne fait pas que traverser la littérature, les mangas et le cinéma mais qui, en chair, en os et minijupe sillonne surtout les rues de Tokyo. J’en profitais pour attaquer quelques idées reçues : l’uniforme n’était pas un signe de soumission mais bien au contraire d’émancipation lorsqu’au début du XXeme siècle les jeunes filles quittaient leurs kimonos pour aller à l’école ou faire du sport. C’était au contraire une façon de libérer l’esprit et le corps du féodalisme. Qu’il soit devenu un objet de fantasme, c’est une toute autre histoire.
Durant mes recherches, je découvrais une auteur de romans pour jeunes fille (ou
« class S » ou encore « yuri »), sorte de version Japonaise
de Colette : Nobuko Yoshiya, dont
les œuvres sont centrées sur des « jeunes filles en uniformes »,
dévorées par des passions homosexuelles. Autre plaisir, et pas des moindres,
projeter sur l’écran de la salle 500 du forum le clip Aitakatta des AKB48. Pourtant ces idoles de 15 ans qui
envahissent le cinéma et la chanson ne sont pas que des poupées kawai en
costume marin. Impératrices des signes, les adolescentes sont d’abord animées
par la passion de la métamorphose, des jeux de rôle, et de l’hybridation.
Romantique, androïde, guerrière ou transgenre, l’adolescente devient, chez des
cinéastes tels que Shinji Somaï (Sailor Suit
& Machine Gun), Nobuhiko Obayashi (House) ou encore Sono Sion (Love
exposure), une créature expérimentale et panique.
Qui est donc alors l’adolescente
japonaise : une figure de l’émancipation, de la consommation ou du chaos ?
Trois extraits en intégralité
Sailor Suit and machine gun (Shinji Somai, 1981)
The Cherry Orchad (Nakahara Shun, 1990)
Helter Skelter (Mika Ninagawa, 2012)
Iconographie
Hideko Takamine à 16 ans |
Momoe Yamaguchi
Hiroko Yakushimaru
Catalogue Rocco Nails
Catalogue Olive des Olive
Schoolgirl Complex
Schoolgirl
Complex (2010) est une très
belle série de livres de photos signées Aoyama Yuki, qui envisagent l’écolière
comme une créature quasi fantastique, une espèce à part. Il n’y a jamais de
visage mais des fragments de corps et de vêtements. Ces corps tirent partie des
pouvoirs de l’uniforme (états oniriques qui leur permet de se dégager de
l’apesanteur) mais semblent également lutter contre la loi que leur imposent
ces quelques pièces de tissus. Postures extraordinaires, torsions de corps qui
amènent au-delà de la forme humaine, contamination par les fétiches (un visage
dévoré par les rubans), l’univers de Schoolgirl
Complex est forcément trouble
et Aoyama Yuki multiplie les images floues derrière des vitres ou des voiles.
Ces écolières sans visages montrent la formation des désirs, embryonnaires, qui
tentent de se dégager de leur chrysalide ou en tout cas d'un carcan social.
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Cinéma,
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Mika Ninagawa,
Neon Genesis Evangelion,
Nobuhiko Obayashi,
Nobuko Yoshiya,
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