La phrase est une de mes préférées de
Sans soleil de Chris Marker
Pour exorciser l’horreur qui a un nom et un visage, il faut lui donner un
autre nom et un autre visage. Les films d’épouvante japonais ont la beauté
sournoise de certains cadavres. On reste quelquefois sonné par tant de cruauté,
on en cherche la source dans une longue intimité des peuples d’Asie avec la
souffrance, qui exige que même la douleur soit ornée. Et puis vient la
récompense : sur la déconfiture des monstres, l’assomption de Natsume Masako.
La beauté absolue a aussi un nom, et un visage.
Elle m’a accompagnée tout au long de la
rédaction de mon livre sur les fantômes japonais. Elle contenait bien sûr une
énigme : qui était Natsume Masako ? Dans le chaos d’images de spectres,
de femmes-chats et de tête volantes, elle pourrait passer presque inaperçue, c’est
la cavalière portant une coiffe étrange.
Masako n’est pas la plus connue des
actrices japonaises en Occident, et on peut supposer que c’est en regardant la NHK
que Marker a appris son existence et son visage félin ne pouvait que le charmer.
Morte d’une leucémie en 1985 à seulement
27 ans, Natsume Masako n’a pas eu le temps d’avoir une longue carrière. Cependant
on peut la voir dans The Catch, un des
chefs-d’œuvre de Shinji Somaï, dans le rôle de la fille du pêcheur interprété
par Ken Ogata.
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